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Pour une meilleure couverture médiatique des femmes politiques (à lire aussi par les hommes)

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La Fédération internationale des journalistes, dont nous sommes membres, a publié des conseils pour une meilleure couverture médiatique des femmes politiques. En effet, alors que les femmes occupent environ 30% des sièges parlementaires en Europe, elles ne représentent que 18% des politiciens et politiciennes qui apparaissent dans les médias d’informations (selon le Projet Mondial de Monitorage des médias (2020). À l’approche des élections au Parlement européen du 9 juin 2024, nous vous partageons ces conseils. L’intérêt est non seulement journalistique, mais démocratique !

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Conseils pour la couverture médiatique des femmes politiques

Le texte ci-après a été écrit par la Fédération internationale des journalistes, à l’occasion des élections européennes 2024. Il est disponible en intégralité sur le site de la FIJ. Ces conseils ont été rédigés en collaboration avec des professionnel.les des médias, journalistes, formatrices, responsables de chaînes, de toute l’Union Européenne dans le cadre du Projet Rewriting the Story: Gender Media and Politics (Réécrire l’histoire: genre, médias et politique). Ceci explique pourquoi les textes ne sont pas toujours adaptés à un contexte français, mais ils donnent des lignes d’analyse tout à fait transposables.

SOURCES

Recherchez l’équilibre des genres dans les sources que vous consultez – assurez-vous que les femmes incluses dans votre histoire ne sont pas seulement des spectatrices/consommatrices/électrices, mais aussi des expertes.

Explication : Selon le Projet mondial de monitorage des médias, les femmes représentent 24% des personnes vues, entendues ou écoutées dans les nouvelles. Elles sont plus susceptibles d’apparaître dans des rôles non exceptionnels , pour partager une expérience personnelle (42% dans les médias traditionnels, 41% sur les sites d’actualités) ou une opinion populaire (38% dans les médias traditionnels, 39% sur les sites d’actualités) et moins susceptibles d’apparaître dans des postes de prise de décision tels que des expertes (24%) ou des politiciennes (18%). Dans le monde entier, les femmes représentent en moyenne 25,6% des membres élus dans les parlements (chambres basses et hautes incluses le cas échéant) et 30,4% en Europe. Représenter les femmes dans des postes de pouvoir, tels que des expertes ou des politiciennes ne contribue pas seulement à refléter adéquatement la réalité de notre société, mais aussi à remettre en question les stéréotypes et les préjugés profondément ancrés et à contribuer à changer les perceptions sociétales des femmes leaders.

IMAGES

Soyez conscient du ratio visage/corps dans le cadrage : inclure un partie importante du corps d’une femme peut renforcer les stéréotypes selon lesquels les femmes sont des décorations ou des objets sexuels, tandis que l’accent mis sur le visage (une pratique répandue pour les hommes) peut générer une perception de plus grande compétence, d’autorité, de crédibilité et de dominance.

Explication : Les images peuvent soit renforcer, soit défier les stéréotypes de genre. Mettre l’accent sur le corps d’une politicienne, plutôt que sur son visage ou ses accomplissements, perpétue l’idée que les femmes seraient des objets décoratifs ou sexuels. En revanche, mettre en valeur le visage d’une femme peut améliorer la perception de sa compétence, de son autorité et de sa crédibilité, contrecarrant les stéréotypes et promouvant l’égalité des genres. Demandez-vous si une photo incluant le corps d’une femme en entier (ou à partir des genoux ou de la poitrine vers le haut) ajoute de l’information/de la valeur à l’image.

LANGUE

Utilisez un langage sensible au genre : dans une langue qui différencie le masculin du féminin, utilisez la forme féminine pour désigner une femme (par exemple, en italien : « La Ministra » au lieu de « Il Ministro » ; « La presidente » au lieu de « Il presidente » ; en anglais, utilisez le pronom féminin – « she » ). Pour les politiciens et politiciennes qui s’identifient comme transgenres, demandez-leur comment les présenter.

Explication : Le langage véhicule des stéréotypes de genre. L’utilisation d’un langage sensible au genre peut changer la perspective d’une histoire et fournir des informations qui sont inclusives pour les hommes, les femmes et les personnes non binaires. Lorsque les reportages utilisent systématiquement un langage neutre ou inclusif, cela remet en question les rôles et les stéréotypes de genre traditionnels. Par exemple, l’utilisation de titres de poste neutres en termes de genre (par exemple, « les responsables politiques » au lieu de « les hommes politiques ») aide à briser le stéréotype selon lequel certaines professions sont exclusivement réservées à un genre particulier. L’utilisation d’un langage qui respecte les pronoms et les identités choisis par les individus favorise une culture de respect et d’inclusivité. Cela reconnaît et affirme le droit des personnes à s’auto-identifier et réduit le risque de mauvaise identification ou d’invalidation des expériences des individus. Le langage sensible au genre démontre un engagement envers l’exactitude et le respect dans le reportage. Il renforce la confiance des audiences diverses qui peuvent se sentir marginalisées ou exclues par un langage qui renforce les stéréotypes ou exclut certaines identités de genre.

SURVIVANTES

Si votre sujet porte sur la violence envers les femmes/les politiciennes, présentez-les comme des survivantes ou comme des femmes ayant surmonté cette violence plutôt que comme des victimes et ne justifiez pas le comportement des agresseurs ni n’entrez dans les détails sur les mobiles de leurs actes. De manière générale, évitez toujours de victimiser les femmes confrontées à de la violence.

Explication : Une victime décrit une personne qui a été blessée ou tuée à la suite d’un crime, d’un accident. Une survivante est quelqu’un qui a connu un processus de reconstruction suite à la violence qu’elle a traversée. Alors que certaines personnes s’identifient en tant que victime, d’autres préfèrent le terme de survivante. La meilleure façon de les respecter est de leur demander leur préférence. Les médias doivent éviter de dépeindre la violence sexiste comme « normale » et de sanctionner la survivante. Soutenir des opinions culturelles actuelles et intrinsèquement sexistes suggérant qu’une femme n’aurait pas été attaquée si elle n’avait pas agit d’une manière qui serait pourtant insignifiante pour un homme (par exemple, s’habiller d’une certaine manière) est très préjudiciable pour les survivantes et véhicule le message qu’il est acceptable d’agresser une femme dans certaines circonstances.

RÉVERSIBILITÉ

Appliquez la règle de la réversibilité ( imaginez que le sujet de votre article est un homme plutôt qu’une femme). L’histoire fonctionne-t-elle toujours ?

Explication : Si vous ne poseriez pas une question à un homme politique, ne la posez pas à une femme ; si vous ne diriez pas quelque chose à propos d’un candidat, n’utilisez pas ces mots à propos d’une candidate.

INTERSECTIONNALITÉ

Assurez- vous de la diversité des sources féminines que vous utilisez, en évitant d’inviter uniquement des femmes ayant des origines ou des profils similaires. Incluez des femmes de diverses origines, religions, orientations sexuelles, cultures, domaines d’expertise et apparences pour offrir une perspective plus complète et représentative.

Explication : Les femmes viennent de milieux divers, de cultures, de religions, d’orientations sexuelles et de domaines d’expertise variés. L’utilisation de voix féminines variées dans les médias reflétera avec précision la diversité des expériences et des perspectives au sein de la population féminine et évitera de perpétuer des stéréotypes. Inviter uniquement des femmes ayant des origines ou des profils similaires peut conduire au tokenisme, où quelques individus sélectionnés sont choisis pour représenter un groupe entier. Cela peut renforcer les stéréotypes et simplifier à l’excès la complexité des expériences des femmes. Pour identifier des expertes de différents milieux, utilisez des bases de données telles qu’Expertalia (Belgique), Expertes (France), 100 Esperte (Italie).

APPARENCE

Évitez de faire référence à l’apparence physique des femmes politiques. En disant par exemple, « la jolie ministre ». Cela détourne l’attention de votre public de sa compétence en tant que leader.

Explication : Commenter l’apparence physique d’une femme politique détourne l’attention de sa compétence, de ses qualifications et de ses positions politiques. Cela l’objectifie et diminue sa valeur en tant que leader politique au lieu de reconnaître ses réalisations et ses contributions à l’intérêt public. Cela sape le poids de son rôle et renforce les stéréotypes qui privilégient l’apparence des femmes par rapport à leurs capacités. La règle de la réversibilité peut vous aider à décider quand commenter l’apparence d’une responsable politique peut être pertinent.

STATUT FAMILIAL

Ne faites pas référence au statut familial/marital des femmes (ou seulement si vous le faites aussi pour les hommes politiques) et ne formulez pas d’hypothèses sur les rôles « appropriés » pour les femmes et les hommes (par exemple, une politicienne accomplie qui est « néanmoins une bonne épouse »).

Explication : La recherche montre que les médias sont plus susceptibles de mentionner des caractéristiques telles que le genre, le statut matrimonial, le statut parental, l’âge, la personnalité et l’apparence des femmes politiques que des hommes4. L’idée la plus admise à propos des femmes est qu’elles sont mères. La maternité d’une figure politique est souvent considérée comme une information. Présenter des femmes politiques en tant que mères, ou sous-entendre que les femmes ne peuvent pas tout avoir parce qu’elles ne peuvent pas être mères et politiciennes véhicule le message qu’il n’est pas possible pour les femmes de mener une carrière politique et détourne l’attention du public de leur message politique. De la même manière, sous-entendre que les femmes qui ne sont pas mères ne peuvent pas connaître ou se soucier de certains domaines politiques est biaisé. Utilisez la règle de la réversibilité en cas de doute.

STYLE DE LEADERSHIP

Ne tombez pas dans le piège de critiquer les femmes qui montrent des traits de caractère soi-disant masculins tels que la force, la compétitivité, l’efficacité, l’intelligence et la ténacité. Les femmes font face à une double contrainte – elles sont critiquées si elles agissent comme des hommes, mais si elles montrent des traits de caractère soi-disant féminins tels que l’empathie, l’honnêteté et la compassion, elles ne sont pas perçues comme des leaders crédibles.

Explication : Une telle construction genrée du leadership confronte les femmes politiques au dilemme de la double contrainte. Cela signifie qu’elles reçoivent des messages contradictoires sur ce qui est attendu d’elles. Critiquer les femmes politiques pour avoir affiché des traits de caractères généralement associés à la masculinité perpétue des stéréotypes de genre nuisibles. Cela renforce l’idée que certaines qualités sont intrinsèquement liées au genre, plutôt que de reconnaître que les qualités de leadership sont indépendantes du genre. Cela peut contribuer à une culture qui limite les opportunités des femmes pour les rôles de leadership et renforce les attentes sociétales sur la manière dont les femmes devraient se comporter. En ne valorisant que certaines qualités dans le leadership, telles que la compétitivité et l’agressivité, la société néglige la valeur de la diversité dans les styles de leadership. Les femmes apportent des perspectives et des approches uniques au leadership qui peuvent compléter et améliorer les qualités de leadership traditionnelles. Critiquer les femmes pour ne pas se conformer aux attentes de genre traditionnelles peut compromettre leur authenticité et les décourager d’être fidèles à elles-mêmes.

ÉMOTIONS

Ne jugez pas les manifestations d’émotion. On attend souvent des femmes politiques qu’elles sourient et dégagent chaleur et compassion, mais elles sont aussi critiquées si elles sourient trop. Les leaders masculins qui expriment la colère sont considérés comme forts, mais la colère des femmes est vue comme de « l’hystérie » ; une femme qui verse des larmes est perçue comme « faible », tandis qu’un homme est « en contact avec ses sentiments ».

Explication: Évitez de juger les expressions d’émotion en politique car ces jugements reflètent et renforcent souvent les biais et stéréotypes de genre. Examiner de trop près les manifestations émotionnelles des femmes politiques peut avoir des effets néfastes sur leur crédibilité et leur efficacité. Une telle perception genrée est renforcée pour les femmes issues de minorités. Si les femmes politiciennes manifestent certaines caractéristiques généralement associées aux hommes, comme la colère, elles ont tendance à être critiquées comme des leaders incroyablement durs avec un comportement agressif. Critiquer les femmes leaders pour leurs expressions émotionnelles peut compromettre leur authenticité et les décourager d’être sincères dans leurs interactions.

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Lire aussi : Les journalistes CFDT ne veulent pas regarder monter l’extrême-droite les bras croisés

Ceci est une publication de CFDT-Journalistes, organisation syndicale représentative des journalistes. www.cfdt-journalistes.fr


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